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Fred Gauthier
01/08/2007, 14h36
Le topic de notre ami Mitch m'a donné le goût de vous faire partager cette histoire toute chaude. Je devais partir le 10 août, comme certains d'entre vous le savaient déjà, mais disons que pour l'instant, je devrai passer mon tour...



Bonjour à tous,

Malgré que j’aie annoncé que je devais partir pour l’Afghanistan dans 9 jours à peine, des circonstances hors de mon contrôle qui sont arrivées dans les 2 dernières semaines me forceront à reporter ou annuler ma mission. Retour en arrière au 14 juillet.

Depuis le début de mes vacances, je n’arrêtais pas : travail dans la maison, sur le terrain, le beau temps aidant et l’énergie était au rendez-vous. Les projets s’enchaînaient et je me découvrais des talents que jusqu’ici je n’avais jamais pensé exploiter. Jusqu’au samedi 14 juillet.

Cette journée là, après avoir travaillé sur un mur de soutènement avec mon voisin, je rentrais souper. Je suis donc entré dans la maison en refermant un peu sec la porte, qui a heurté l’ongle de mon gros orteil du pied droit, au point qu’il bougeait pas mal. Comme je suis en service actif au sein des Forces canadiennes, je me dois d’utiliser les services médicaux militaires, ce que je fis, mais le lundi suivant, car ils sont fermés la fin de semaine.

Lundi, je me présente donc à la « parade des malades » au Centre de santé de la garnison Valcartier. Quand ce fut mon tour (c’est pas parce que c’est militaire qu’on n’attends pas), on vérifie mon orteil, le panse, et quand le doc arrive, je lui parle d’une drôle de crampe que j’ai dans le ventre depuis quelques jours, au moins sept. Cela l’intrigue et la batterie de test commence : radiographies, échographies, pour se terminer avec un taco le 23 juillet dernier, mais au CHUL.

Je passe donc le taco lundi matin, à jeûn, et à mon retour à la maison, à peine une demi-heure après, le téléphone sonnait. C’était le méecin militaire qui me rappelait pour m’enjoindre d’aller le voir sans faute à 13h00, au Centre de santé de la base. Je lui demande s’il a des bonnes nouvelles, et il me répond qu’il ne pose pas de diagnostic au téléphone.

À 13h00, je suis là, et quand ce fut mon tour, je passe dans le bureau du doc. Il m’annonce que j’ai une appendicite rupturée avec péritonite, ce qui, en gros, et en termes plus vulgaires (ou vulgarisés) veut dire que l’appendice était fendu et du pus et de la merde sortait et infectait mon bedon, et ce n’était pas récent. J’étais en train de m’empoisonner. Il m’ausculte alors une énième fois, et sentant ma frustration d’arriver à 2 semaines d’un départ en Afghanistan, après tant de préparation mentales, physiques, familiales et me faire annoncer que je partais plus, il me dis de lui dire clairement où j’ai mal, quand il pèse sur mon ventre. Le problème, c’est que j’avais une légère crampe, et quand je dis légère, eh bien je n’étais pas à l’article de la mort, loin de là. En fait, j’avais mal juste quand on exerçait une très forte pression sur mon ventre, et quand je me penchait pour attacher mes souliers, par exemple. Rien de plus. En fait, si ce n’avait été de mon orteil, je n’aurais jamais consulté pour mes douleurs au ventre, jamais.

Il me donne alors un papier et m’ordonne de me présenter dans les plus brefs délais à l’urgence du CHUL pour me faire opérer. Il est 14h00.

Comme je partais, nous avions décidé ma conjointe et moi de vendre une des 2 voitures, donc j’allais les porter elle et les enfants, à tous les matins. Son quart de travail se terminait vers 15h00, j’ai donc décidé de me rendre tranquillement vers son lieu de travail, au Lac-St-Charles. Quand elle a terminé, je lui annonce qu’on s’en va au CHUL à l’Urgence, pour mes crampes abdominales qui seraient une appendicite. Elle n’en revient pas (elle travaille dans le domaine de la santé).

Arrivés au CHUL (j’ai conduit mon auto tout le long, en passant), on se présente au triage avec le papier du médecin militaire. En fait, je n’avais jamais attendu si peu longtemps dans une salle d’attente. L’infirmière lit le diagnostic et part à rire. On se regarde et on lui demande : « Qu’est-ce qu’il y a de drôle? », et l’infirmière de répondre : « Ben d’habitude, les gens qui ont ce que vous avez arrivent soit pliés en 2, soit en ambulance. » Nouveau regard en coin, et elle me demande si j’ai besoin d’une chaise roulante. Ben voyons…

On se rend plus loin et on arrive dans le coin des lits à l’Urgence. Comme il n’y avait pas de place, on est obligés d’attendre, accoudés au bureau des infirmiers. Les gens passent et m’annoncent qu’il n’y a pas de visite; je sais, je suis admis à l’urgence. Pourquoi? Appendicite rupturée. Nouveaux éclats de rire. C’t’une joke? Ben non. Finalement, on me trouve un lit, et là, tout ce précipite : une belle jaquette bleue ouverte dans le dos (honte totale pour un gars de 33 ans), couche sur le lit, transporte en salle d’opération (coudon, je peux marcher), tout le monde me regarde, pis là, je suis gêné pas pour rire.

Maintenant, couché sur la table d’opération (j’y suis monté tout seul), on me place les bras, on me met l’oxygène et on me demande de respirer à fond. Me sent partir un brin, j’entends « 300! », mais résiste. Là, je me sens un peu plus drôle, pis un « 350! » est lancé. Mes yeux ont failli se fermer, mais j’ai résisté. Enfin j’entends un « 400! », mes yeux se ferment sans que j’y puisse quoi que ce soit, suivi d’un « on l’a eu! », et vide total.

Ici, il y a un blanc, car je ne me souviens plus de rien, pis je pense que c’était mieux comme cela.

Le réveil est brumeux et le souvenir qu’il m’en reste est que j’avais faim. En fait, le lendemain de l’opération, au souper, je mangeais solide tellement j’avais faim. Le moral était bon, ils avaient réussi à tout enlever même si ça aurait été un peu long (2 heures sur le billard, tandis que ça en prend normalement 45 minutes). Bref, je sortais samedi, dimanche au plus tard, donc plus qu’à reprendre des forces, manger, dormir, et guérir. On était mardi.

Vendredi ne fut pas une belle journée. Comme la veille, sans trop forcer, j’étais allé à la selle 3 fois dans la même période de 24 heures, on me mis en quarantaine, en prévention pour le C difficile. (Leurs présomptions ne se sont jamais vérifiées, car à ma sortie hier, nous n’avions toujours pas reçu le résultat du test). Cette nouvelle m’a scié les 2 jambes, car ça impliquait que tous les gens qui entrent dans ma « cellule » doivent revêtir une combinaison jetable et porter des gants, plus le droit d’utiliser la salle de bain commune ni pour les besoins, ni pour se brosser les dents ou se laver (on me donnait des Wet-Ones), et j’étais privé de sortie. Donc, un bon vieux « dead lock », 24 heures sur 24.

Un peu plus tard, mon chirurgien m’annonce 2 choses :

1) le C Difficile n’est pas une raison pour me garder à l’hôpital;

2) ils sont quand même obligés de me garder, car mes reins ont étés affectés et ne fonctionnent plus qu’à 50%. La date de sortie est repoussée au mieux au mercredi suivant.

Coup de massue.

Mes reins ont subi un stress énorme et fonctionnent difficilement. Différents facteurs reliés les uns aux autres expliquent ceci : les antibiotiques puissants utilisés, la déshydratation, la chaleur, l'épuisement, etc. Tout cela a fait que les reins n'éliminaient plus une certaine protéine, la créatinine, et j'étais en train de m'empoisonner, encore une fois. Mais la solution pour y remédier est de m'hydrater à la planche (2 fois 1 litre en intraveineuse en seulement 1 heure chacun, ensuite soluté à 150 ml/heure, plus j’avais soif terriblement). En gros, j’ai pissé ce que j’ai bu/ingurgité/injecté dans mon corps, soit 7,5 litres de pisse par jour, pendant 4 jours.

La bonne nouvelle dans tout cela, c'est que j'ai dû perdre 15 livres! Je suis maintenant en congé médical pour 4 semaines, suivi par une période de travaux légers de 6 semaines, à réévaluer durant la période. Pour l’instant, mon patron qui est déjà en Afghanistan et qui me contacte pour mon état travaille pour m’avoir au bout de ces semaines de repos. Moi, juste d’être revenu à la maison et mon état s’est pas mal amélioré, j’en suis sûr. L’hôpital, c’est pas fait pour les gens entre 20 et 40 ans, trop déprimant. J’ai arrêté de manger samedi, tout m’écoeurait. Depuis hier, ça fait déjà 2 fois que je mange, et un peu plus chaque fois.

Merci aux personnes concernées du soutien que vous m'avez apporté, ce fut très apprécié dans cette semaine où les mauvaises nouvelles n'arrêtaient plus d'affluer.

kid
01/08/2007, 14h52
Wow, toute une histoire,

Bon rétablissement et bon courage en espèrant pour toi que tu seras en mesure d'aller rejoindre ton commandant :)

To_Yo_Ta
01/08/2007, 15h44
Je suis infirmier dans une salle d'urgence et remerci ton petit orteil, sinon tu n'écrirait pas tes texte aujdh.

Effectivement, la geule m'est venu a terre, presque aucune dlr rien. J'ai jamais vue ca mek. Habituellement, c'est la salle d'op right now et tu est barrouetté.

Mais bon, tu semble bien ce jour, cela est tous ce qui compte...

Je sais que tu dois trouvé dommage le fais d'une grande préparation à l'aventure. Un de mes amis, basé a Edmonton a fait 6 mois la bas.

Imagine si tu aurais eu des complication la bas.

Mais tout est parti remise. Ca va etre un nouveau commencement pour une prochaine mission. Avant d'aider ailleur, il faut aider sois meme.

Bonne chance mek.

Flaguette
01/08/2007, 22h12
Ouf!

Tu sais, Fred, dans la vie, rien n'arrive pour rien. Je vais dire comme To_Yo_Ta : heureusement pour toi que tu t'es cogné le gros orteil! (en passant, tu ne nous a jamais dit comment il se portait, lui, dans tout ça :wink: )

Car ta situation aurait certainement empiré à plus ou moins court terme. Si tu avais attendu plus longtemps, tu aurais certainement eu des douleurs pires. Et imagine si c'était arrivé là-bas! Bien sûr, c'est très difficile quand tu attends quelque chose et que finalement, tout doit être reporté. Mais sans ton orteil, ...

Alors prompt rétablissement. Et tiens nous informé des développements!

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01/08/2007, 22h58
Qui sait, peut-être que tu serait tombé au champ d'honneur là-bas. Vois ça comme de la chance, il n'y a rien qui arrive pour rien, c'est de la chance que tu as eu et tu peux remercier ton médecin d'avoir détecter le trouble, qui sait où tu serais aujourd'hui sinon?

Si tu as la chance, vas le remercier du fond du coeur, je suis moi-même médecin et il n'y a rien qui fait plus plaisir que ça, surtout que ça arrive rarement qu'un patient nous remercie, d'habitude c'est plutôt : '' je serais mieux traîter dans une animalerie''. IL faut dire que dans une urgence, ce n'est pas toujours facile. mais bon...