Alain36
14/11/2006, 07h55
Le mardi 14 nov 2006
PLUS DE 700 DÉCÈS PAR ANNÉE
Le bilan routier suit une courbe meurtrière
Denis Lessard
Québec
Si la tendance se maintient, 721 personnes perdront la vie dans un accident de la route au Québec en 2006. Ces décès en feraient l'année la plus mortelle depuis 2000 et représenteraient une augmentation de 10% sur la moyenne des cinq dernières années.
C'est le constat inquiétant sur une situation «désastreuse» que fera la Société d'assurance automobile du Québec (SAAQ), demain, au cours d'un colloque organisé à Québec par l'Association québécoise du transport et des routes, a appris La Presse.
L'événement réunira les acteurs de la sécurité routière au Québec: le président de la Table québécoise, Jean-Marie De Koninck, le président de la SAAQ, John Harbour, et le sous-ministre de Transports Québec, Denys Jean, des policiers et des universitaires.
L'an dernier, on a compté 704 décès, le même nombre enregistré jusqu'ici cette année. Il faut remonter à 2000 pour trouver pire; la route a fait alors 765 morts.
Le bilan de 2006 est plus sombre que celui que véhiculait la SAAQ dans ses bulletins internes la semaine dernière, qui prévoyait 714 décès.
Selon les informations obtenues par La Presse, les chiffres sont encore plus sombres du côté des accidents graves, nécessitant une hospitalisation. Les 6397 cas prévus en 2006 signifient une augmentation de près de 16% sur la moyenne des cinq années précédentes.
L’AQTR a invité des spécialistes français de ces questions à ses assises. Car le parallèle avec la France est bien embarrassant pour le Québec. L’Hexagone est loin d’avoir le meilleur bilan routier d’Europe, mais Paris a imposé un changement de cap quand on s’est approché des 7000 décès annuels, l’équivalent de 700 morts pour le Québec où on trouve 10 fois moins de routes, et 10 fois moins d’automobilistes.
En France, l’utilisation du cellulaire au volant est prohibée – seul le mains-libres est permis – et les policiers utilisent largement les cinémomètres. Mais les Français ont des mesures bien plus musclées: on suspend pour un mois le permis de conduire d’un automobiliste qui dépasse de 30 km/h la limite permise.
Au Québec, on est loin d’une telle fermeté. Le ministre des Transports Michel Després promet maintenant pour le printemps 2007 une nouvelle politique de sécurité routière qu’il a annoncée successivement pour l’automne puis l’hiver 2006.
Dans l’attente de la décision du gouvernement, la SAAQ avait stoppé ses campagnes automnales de sensibilisation. Consciente des mauvaises nouvelles à l’horizon, elle a diffusé hier deux communiqués. Le premier souligne l’importante des excès de vitesse dans le bilan des décès – 150 morts et 7500 blessés à cause de la vitesse. Le second souligne l’hécatombe chez les jeunes entre 16 et 24 ans, qui comptent pour 10 % des conducteurs, mais causaient, en 2005, 23 % des accidents.
Pour beaucoup de membres de la Table de la sécurité routière, le problème de la sécurité sur les routes ne nécessite pas un nouveau Code de la route, mais de meilleurs contrôles. «On doit mieux appliquer le Code actuel, avec de meilleurs instruments, comme le photo-radar», résume Normand Bolduc, maire de Neuville, qui représente la Fédération québécoise des municipalités au sein du comité de la sécurité routière. «On fait grand cas d’un décès en Afghanistan, mais chaque fin de semaine, de cinq à sept personnes, souvent des jeunes, meurent sur nos routes et on semble trouver cela normal», s’insurge M. Bolduc.
Des sources au sein de ce groupe indiquent qu’un consensus pourra être trouvé pour l’utilisation des cinémomètres. Les policiers, convaincus désormais qu’ils ne perdront pas de postes avec cette technologie, sont maintenant beaucoup plus réceptifs. En revanche, les discussions sont moins faciles quand on parle du cellulaire au volant, l’industrie du taxi et du camionnage estimant qu’il s’agit d’un instrument de travail. Une commission parlementaire de l’Assemblée nationale s’est prononcée contre le cellulaire au volant, mais le main-libre serait autorisé.
Mais dès que le cinémomètre et l’interdiction du cellulaire sont évoqués, les apparatchiks du gouvernement Charest « sont très froids », dit-on. Dans l’entourage du premier ministre, on craint de lancer un débat public dans les mois précédant les élections.
Un bilan routier de plus en plus désastreux n’échappe pas au club automobile CAA: «Depuis cinq ans, le nombre des décès et blessés est toujours en hausse», déplore Roxanne Héroux, porte-parole du CAA.
Selon elle, au-delà des accidents, on constate une érosion évidente dans l’attitude des automobilistes québécois. «Le partage de la route, la courtoisie au volant, ce sont des valeurs qui sont en recul», observe Mme Héroux. Pour le CAA, «le statu quo n’est pas une solution pour les jeunes conducteurs». En Ontario, on est beaucoup plus sévère à l’endroit de ces jeunes conducteurs, qui n’ont pas le droit de conduire entre minuit et 5h du matin, observe Mme Héroux.
Le CAA est opposé à l’utilisation de tout gadget électronique au volant (DVD, GPS, et cellulaires). Mais d’autres avenues que l’interdiction dans la loi peuvent être envisagées. Selon Mme Héroux, des campagnes de sensibilisation pourraient inciter les gens à ne pas utiliser ces appareils au volant.
Même si le cellulaire est banni et qu’on permet les conversation en mains libres, on n’a rien réglé quant au «problème cognitif», la distraction des automobilistes qui conduisent tout en ayant une conversation téléphonique, souligne Mme Héroux.
Vous êtes au gouvernement, vous faites quoi pour réduire le nombre de morts sur nos dès 2007 (au moins 100 morts de moins)?
PLUS DE 700 DÉCÈS PAR ANNÉE
Le bilan routier suit une courbe meurtrière
Denis Lessard
Québec
Si la tendance se maintient, 721 personnes perdront la vie dans un accident de la route au Québec en 2006. Ces décès en feraient l'année la plus mortelle depuis 2000 et représenteraient une augmentation de 10% sur la moyenne des cinq dernières années.
C'est le constat inquiétant sur une situation «désastreuse» que fera la Société d'assurance automobile du Québec (SAAQ), demain, au cours d'un colloque organisé à Québec par l'Association québécoise du transport et des routes, a appris La Presse.
L'événement réunira les acteurs de la sécurité routière au Québec: le président de la Table québécoise, Jean-Marie De Koninck, le président de la SAAQ, John Harbour, et le sous-ministre de Transports Québec, Denys Jean, des policiers et des universitaires.
L'an dernier, on a compté 704 décès, le même nombre enregistré jusqu'ici cette année. Il faut remonter à 2000 pour trouver pire; la route a fait alors 765 morts.
Le bilan de 2006 est plus sombre que celui que véhiculait la SAAQ dans ses bulletins internes la semaine dernière, qui prévoyait 714 décès.
Selon les informations obtenues par La Presse, les chiffres sont encore plus sombres du côté des accidents graves, nécessitant une hospitalisation. Les 6397 cas prévus en 2006 signifient une augmentation de près de 16% sur la moyenne des cinq années précédentes.
L’AQTR a invité des spécialistes français de ces questions à ses assises. Car le parallèle avec la France est bien embarrassant pour le Québec. L’Hexagone est loin d’avoir le meilleur bilan routier d’Europe, mais Paris a imposé un changement de cap quand on s’est approché des 7000 décès annuels, l’équivalent de 700 morts pour le Québec où on trouve 10 fois moins de routes, et 10 fois moins d’automobilistes.
En France, l’utilisation du cellulaire au volant est prohibée – seul le mains-libres est permis – et les policiers utilisent largement les cinémomètres. Mais les Français ont des mesures bien plus musclées: on suspend pour un mois le permis de conduire d’un automobiliste qui dépasse de 30 km/h la limite permise.
Au Québec, on est loin d’une telle fermeté. Le ministre des Transports Michel Després promet maintenant pour le printemps 2007 une nouvelle politique de sécurité routière qu’il a annoncée successivement pour l’automne puis l’hiver 2006.
Dans l’attente de la décision du gouvernement, la SAAQ avait stoppé ses campagnes automnales de sensibilisation. Consciente des mauvaises nouvelles à l’horizon, elle a diffusé hier deux communiqués. Le premier souligne l’importante des excès de vitesse dans le bilan des décès – 150 morts et 7500 blessés à cause de la vitesse. Le second souligne l’hécatombe chez les jeunes entre 16 et 24 ans, qui comptent pour 10 % des conducteurs, mais causaient, en 2005, 23 % des accidents.
Pour beaucoup de membres de la Table de la sécurité routière, le problème de la sécurité sur les routes ne nécessite pas un nouveau Code de la route, mais de meilleurs contrôles. «On doit mieux appliquer le Code actuel, avec de meilleurs instruments, comme le photo-radar», résume Normand Bolduc, maire de Neuville, qui représente la Fédération québécoise des municipalités au sein du comité de la sécurité routière. «On fait grand cas d’un décès en Afghanistan, mais chaque fin de semaine, de cinq à sept personnes, souvent des jeunes, meurent sur nos routes et on semble trouver cela normal», s’insurge M. Bolduc.
Des sources au sein de ce groupe indiquent qu’un consensus pourra être trouvé pour l’utilisation des cinémomètres. Les policiers, convaincus désormais qu’ils ne perdront pas de postes avec cette technologie, sont maintenant beaucoup plus réceptifs. En revanche, les discussions sont moins faciles quand on parle du cellulaire au volant, l’industrie du taxi et du camionnage estimant qu’il s’agit d’un instrument de travail. Une commission parlementaire de l’Assemblée nationale s’est prononcée contre le cellulaire au volant, mais le main-libre serait autorisé.
Mais dès que le cinémomètre et l’interdiction du cellulaire sont évoqués, les apparatchiks du gouvernement Charest « sont très froids », dit-on. Dans l’entourage du premier ministre, on craint de lancer un débat public dans les mois précédant les élections.
Un bilan routier de plus en plus désastreux n’échappe pas au club automobile CAA: «Depuis cinq ans, le nombre des décès et blessés est toujours en hausse», déplore Roxanne Héroux, porte-parole du CAA.
Selon elle, au-delà des accidents, on constate une érosion évidente dans l’attitude des automobilistes québécois. «Le partage de la route, la courtoisie au volant, ce sont des valeurs qui sont en recul», observe Mme Héroux. Pour le CAA, «le statu quo n’est pas une solution pour les jeunes conducteurs». En Ontario, on est beaucoup plus sévère à l’endroit de ces jeunes conducteurs, qui n’ont pas le droit de conduire entre minuit et 5h du matin, observe Mme Héroux.
Le CAA est opposé à l’utilisation de tout gadget électronique au volant (DVD, GPS, et cellulaires). Mais d’autres avenues que l’interdiction dans la loi peuvent être envisagées. Selon Mme Héroux, des campagnes de sensibilisation pourraient inciter les gens à ne pas utiliser ces appareils au volant.
Même si le cellulaire est banni et qu’on permet les conversation en mains libres, on n’a rien réglé quant au «problème cognitif», la distraction des automobilistes qui conduisent tout en ayant une conversation téléphonique, souligne Mme Héroux.
Vous êtes au gouvernement, vous faites quoi pour réduire le nombre de morts sur nos dès 2007 (au moins 100 morts de moins)?