Plusieurs le prétendent. Si c'est vrai, on va assister à des sommets d'inventivité d'ici quelques années:

Le samedi 07 juillet 2007

Un bleu sans algues bleu-vert

Violaine Ballivy
La Presse

Les moines de l'Abbaye Saint-Benoît-du-Lac ont des ennuis avec le bleu. Pas celui de leur fromage: celui des algues bleu-vert qui ont refait surface dans les eaux du lac Memphrémagog, et que le ministère de l'Environnement vient de déclarer impropres à la consommation. Le fromage qui a fait leur renommée est donc maintenant produit avec de l'eau puisée... à Rivière-des-Prairies.

Le paysage idyllique de la paisible abbaye n'est plus tout à fait le même depuis jeudi. Désormais, les visiteurs sont accueillis par une affiche leur rappelant qu'il est interdit de boire l'eau du robinet et qu'il vaut mieux en limiter l'utilisation au moment de se laver les mains. Mais surtout, un imposant camion-citerne trône près de la fromagerie. Chaque jour, il fera la navette jusqu'à Montréal pour approvisionner le monastère de 15 000 litres d'eau potable, le strict minimum pour assurer la production fromagère.

Au-delà des considérations écologiques, les moines se seraient bien passés de ce fléau qui risque de leur coûter cher, très cher. «Tout cela implique des dépenses supplémentaires imprévues très importantes, constate le père André Blanchet. Nous avons besoin d'un certain revenu annuel pour vivre, faire des réparations, repeindre.» Les comptes seront difficiles à boucler cette année, prévoit-il. Il n'y aura probablement pas de surplus à redistribuer aux familles à faible revenu.

«Ce qui est embêtant, c'est qu'on risque d'être aux prises avec les algues tout l'été... se désolait hier le père Blanchet. L'an dernier, elles sont sorties en septembre et elles ont disparu avec l'arrivée du froid. Alors à moins que l'été soit exceptionnellement froid et neigeux... On va devoir payer le camion-citerne jusqu'en novembre.»

La production sera certainement ralentie. Déjà, les moines ont dû renvoyer un plein camion de lait, jeudi, et plusieurs équipements de la fromagerie devront être mobilisés simplement pour assurer l'acheminement de l'eau potable. La besogne sera plus longue et plus éreintante. Les moines devront s'assurer de désaltérer leur quarantaine de retraitants, puis penser à faire toutes les analyses de la qualité de l'eau exigés par le ministère de l'Environnement du Québec et Santé Canada.??Heureusement, le goût du fromage, lui, ne devrait pas trop en pâtir.«Ce n'est pas l'eau qui lui donne son goût unique, assure le frère Flageole, apprenti fromager. C'est le lieu. L'élévation par rapport au niveau de la mer, le bâtiment. Même en utilisant les mêmes ingrédients ailleurs, on n'arriverait pas à recréer les mêmes saveurs.»

Avis de non-consommation

Pour le moment, l'avis de non-consommation de l'eau est limité aux petites municipalités de Potton, Owl's Head et Saint-Benoît-du-Lac, qui comptent au total quelque 1000 résidants, de même qu'à tous les riverains qui puisent leur eau directement dans le lac. Les activités récréatives sont peu ou pas touchées: la baignade est encore permise.??Gisèle Lacasse Benoît, présidente de l'organisme Memphrémagog Conservation, n'en est pas moins inquiète de voir les algues arriver si tôt cette année. Elle dénonce l'absence de plan d'action ciblé pour la région afin de résoudre le problème à long terme, et réclame la mise sur pied d'un comité pour étudier les sources de phosphore qui stimulent la prolifération des algues bleu-vert.??«Il y a 20 marinas, 4000 bateaux, sept clubs de golf, deux lieux d'enfouissement de déchets à proximité du lac, et la population va augmenter de 25% au cours des 25 prochaines années. Il faut absolument étudier l'impact de tout cela», dit-elle.??Gisèle Lacasse Benoît dénonce aussi le «manque de civisme» de certains riverains, qui permettent de couper les arbres comme bon leur semble pour le plaisir d'avoir une meilleure vue sur le lac. Hier encore, elle a déposé quatre plaintes contre des riverains qui n'ont pas respecté le règlement interdisant le déboisement à 10 mètres des rives d'un plan d'eau.

Économie

Reste aussi à savoir si les touristes viendront aussi nombreux flâner dans les environs alors que les vacances commencent à peine. Pour le moment, la directrice de la Chambre de commerce et d'industrie Magog-Orford évite de s'alarmer. «On fera la promotion des autres attraits. Il n'y a pas que la baignade ici», notait hier Francine Caya.

Serge Roy, agent immobilier, prévoit toutefois que la valeur des maisons des riverains en souffrira. «Est-ce que les gens vont encore vouloir dépenser des fortunes pour habiter sur le bord d'un lac où ils ne peuvent même pas se baigner? Je ne pense pas. Les acheteurs ne délaisseront pas la région, mais choisiront de s'installer plus à l'intérieur des terres ou sur le bord de petits lacs écologiques.»

Le ministère de l'Environnement et du Développement durable a détecté la présence d'algues bleu-vert dans six lacs et rivières en Estrie et dans plus d'une trentaine au Québec cette année.


On gage-tu que l'humain, avec son extraordinaire faculté d'adaptation, va trouver à vivre avec ça? Va se faire creuser une piscine en arrière du chalet. Va acheter de l'eau embouteillée (le fait déjà d'ailleurs, probablement). Va rester assis dans son salon à profiter du lac comme simple décor en faisant de la bicyclette stationnaire, en faisant du canot sur une machine à ramer, ou en nageant sur une machine à nager (à inventer).

On fait dur! Et si ça se rendait dans le fleuve?