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L'ancêtre des AMG

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Lesley Wimbush
Je me trouve sur une piste d'atterrissage au beau milieu d'un champ de maïs près de Stuttgart, en Allemagne. J'ai l'impression de vivre le film Le champ des rêves. Certes, je suis ici pour essayer la nouvelle Mercedes-Benz S 63 AMG, mais devant moi se dresse un monument de l'histoire automobile : la 300 SEL 6.8 AMG, surnommée « The Red Pig ».

Je sais que les représentants de Mercedes-Benz n'ont pas vraiment le sens de l'humour, mais j'ai quand même posé la question : « est-ce qu'on peut la conduire? » À ma grande surprise, ils ont accepté.

Incroyable! Je vais pouvoir piloter l'ancêtre des AMG, la voiture sur laquelle se fonde toute l'histoire de la division de performance de Mercedes-Benz!

Euh, pas tout à fait...

Voyez-vous, après avoir dominé des bolides beaucoup plus petits et légers lors des 24 Heures de Spa-Francorchamps en 1971, la 300 SEL 6.8 AMG a été vendue au fabricant d'avions français Matra, qui désirait tester le train d'atterrissage de ses chasseurs.

Mercedes-Benz 300 SEL 6.8 AMG
Mercedes-Benz 300 SEL 6.8 AMG

Bref, au lieu d'aboutir là où elle se doit, c'est-à-dire dans le musée de Mercedes-Benz, la truie rouge a été éventrée pour que des ingénieurs puissent faire descendre des pneus d'avions sur le tarmac à une vitesse de 320 km/h et en mesurer la résistance. Malheureusement, personne ne sait ce qu'elle est devenue par la suite.

Consciente de sa bourde, Mercedes-Benz a cherché à créer une réplique aussi fidèle que possible en vue de l'exposer au Salon de l'auto de Genève 2006. La tâche s'est avérée difficile, car très peu d'exemplaires du modèle original avaient été produits.

Par chance, une voiture convenable a été dénichée à Berlin. Les autres pièces nécessaires au projet ont quant à elles été puisées à la grandeur de l'Europe. On retrouve sous le capot le même V8 de 6,8 L développant 420 chevaux (une puissance exceptionnelle à l'époque). Les ailes démesurées abritent des roues en magnésium, la truffe carrée regorge de lumières et les flancs arborent les mêmes motifs que la légende.

Déçue de faire face à une simple réplique, je me console en pensant que toute l'attention et tout le souci du détail dont elle a profité rendent hommage d'une certaine façon à la 300 SEL 6.8 AMG. J'ai des papillons dans le ventre en ouvrant la porte et en m'assoyant dans le siège de course classique, entouré de boiseries ringardes ainsi que d'un long et mince levier de vitesses au pommeau en forme de sphère.

Après plusieurs promesses d'y aller en douceur, je tourne la clé et la bête se réveille dans un mélange de grognements secs et d'éructations sonnantes. Agrippant le volant délicat et glissant le levier en marche avant (oui, il s'agit d'une automatique, mais je m'en fous!), je déferle sur la piste tout en reniflant l'odeur prononcée du carburant de course et en écoutant la cacophonie du moteur.

Terriblement bruyante, aussi manœuvrable qu'un bateau-remorqueur et dotée de freins très rudimentaires, la grosse berline trouve quand même le moyen de me charmer. Je sors finalement du cockpit avec un sourire fendu jusqu'aux oreilles. Et d'après ce que je vois, je ne suis pas la seule.

Le fait qu'une réplique de voiture puisse procurer autant de sensations démontre toute l'importance de préserver nos classiques. « The Red Pig » a disparu, mais son héritage demeure bien vivant.
Lesley Wimbush
Lesley Wimbush
Expert automobile
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