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Les rabais gouvernementaux encore nécessaires pour les VÉ ?

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Vincent Aubé
La question mérite d’être posée alors que l’industrie évolue rapidement

L’année 2020 marque un passage important dans l’histoire de la voiture électrique moderne.  Cela fait déjà dix ans que la Nissan LEAF roule sur nos routes, la citadine qui était apparue sur le marché en 2010 en tant que modèle 2011 à l’époque. Il est vrai que la Tesla Roadster a devancé la LEAF, mais sa distribution beaucoup trop limitée l’écarte des discussions d’amateurs d’énergie électrique.

L’année 2020 marque aussi un pas important dans l’acceptation de ce mode de propulsion automobile, l’industrie qui multiplie (enfin) à vitesse grand V les modèles électriques, tandis que du côté politique, les élus du globe poussent eux aussi pour un parc automobile plus électrifié que jamais.

Une décennie après la Nissan LEAF, première véritable voiture électrique populaire, on peut confirmer hors de tout doute que l’automobile de demain sera alimentée par le câble d’une borne de recharge au domicile, au restaurant ou à n’importe quel autre endroit sur la route.

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Nissan LEAF, Chevrolet Bolt
Nissan LEAF, Chevrolet Bolt | Photo : D.Boshouwers

Les incitatifs encore nécessaires ?
Malgré la popularité sans cesse grandissante des électriques, un fait demeure : le prix exigé pour ces véhicules propres est encore plus cher que celui d’un véhicule à essence de qualité similaire. Bref, au moment d’écrire ces lignes, en 2020, les programmes de rabais gouvernementaux sont plus que jamais nécessaires pour accélérer l’acceptation des VÉ (pour véhicules électriques) auprès du public, surtout en considérant les objectifs assez ambitieux de nos instances gouvernementales.

D’ailleurs, de l’autre côté de la clôture, les constructeurs promettent aussi un changement radical de leur alignement au fil des cinq à dix prochaines années. Les annonces ne sont pas rares sur l’arrivée prochaine d’une panoplie de nouveaux modèles électriques.

On n’a qu’à penser au groupe Volkswagen qui a fait de la voiture électrique sont nouveau fer de lance; sa gamme de produits électriques ID prend tranquillement forme, après des années de promesses. BMW, Mercedes-Benz, Audi, Ford – tous one élaboré leur propre stratégie ambitieuse. General Motors vient d’ailleurs de ramener le nom Hummer au sein de la gamme GMC, le premier modèle (d’une gamme complète de VÉ) basé sur une plateforme dédiée à l’énergie alternative.

| Photo : GMC

L’écart rétréci, mais…
Pour illustrer l’importance des programmes de rabais gouvernementaux tels le programme iVZE du fédéral, prenons le temps d’examiner le cas d’un modèle populaire, car c’est ce type de véhicule qui va changer la donne au final. Les véhicules électriques classés au sein d’une catégorie plus élitiste s’adressent à un public plus en moyens (qui n’ont pas vraiment besoin d’un rabais à l’achat), ce qui n’est pas le cas des acheteurs de Honda Civic ou de Toyota Corolla, deux véhicules très populaires auprès des membres de la classe moyenne.

Prenons la Chevrolet Bolt par exemple, une électrique suffisamment autonome (entre les recharges) et relativement pratique au quotidien pour une petite famille. Le prix de départ d’une livrée de base LT est de 44 998 $, le prix à l’achat qui doit aussi comprendre les frais de transport de 1800 $, les frais pour le climatiseur de 100 $ et les frais de concessionnaires de 250 $, ce qui porte la facture à 47 148 $, le tout avant les deux rabais en vigueur au pays ou dans les provinces concernées (Québec ou Colombie-Britannique).

Au Québec, les rabais fédéraux et provinciaux enlèvent 11 307 $ à la facture. Résultat : le prix de la Bolt LT sans aucune option ajoutée est finalement de 35 841 $ avant les taxes en vigueur. Bref, le prix de cette Bolt est un peu plus dispendieux que celui d’une Volkswagen Golf GTI de base. Et même si la sportive allemande en donne énormément pour le prix exigé, il ne s’agit pas encore d’une voiture accessible à la majorité.

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Une brève recherche à travers les sites web de quelques constructeurs automobiles populaires en arrive un peu à la même conclusion : les véhicules électriques abordables peuvent, pour la majorité d’entre eux, être acquis pour une somme inférieure à 40 000 $ (avant les taxes) lorsque les rabais gouvernementaux, du moins lorsqu’il s’agit de véhicules vendus au Québec où les réductions sont les plus intéressantes. C’est mieux, mais l’écart est encore bien présent!

Rappelons que le programme iVZE du gouvernement fédéral est entré officiellement en vigueur le 1er mai 2019. En quelques mois, les constructeurs constataient déjà une forte augmentation des ventes de véhicules électriques éligibles en réaction au programme.

L’effet Doug Ford
Pour illustrer à quel point les incitatifs financiers de nos instances gouvernementales ont du poids dans l’achat d’un VÉ, il faut regarder du côté de l’Ontario, la province la plus peuplée au pays qui a vu son gouvernement abolir le programme des rabais gouvernementaux à l’automne 2018. C’est donc de dire que les consommateurs ontariens ont pu s’habituer (depuis un peu plus d’un an) au fait que leur gouvernement provincial ne donnait plus un seul sou à l’achat d’un véhicule électrifié.

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Quel effet cette décision du gouvernement Ford a-t-elle eu sur les ventes de véhicules électriques en Ontario ?

Chez Volkswagen par exemple, où seule l’e-Golf est éligible aux rabais gouvernementaux, les ventes de la compacte électrique ont chuté dramatiquement entre 2018 et 2019, passant de 343 unités à 60 seulement l’an dernier. Pendant ce temps, les ventes augmentaient en Colombie-Britannique (224 en 2018 et 277 en 2019) et même plus au Québec (605 en 2018 et 872 en 2019).

Chez Nissan Canada, l’aile ontarienne du constructeur a travaillé très fort pour livrer un maximum d’unités de la LEAF avant la date limite du programme ontarien d’incitatifs financiers. Malgré les livraisons de dernière minute, Nissan n’a écoulé que 241 copies de sa voiture électrique contre 2009 en 2018. Cependant, au Québec, Nissan enregistrait également des pertes (2670 en 2018 contre 1643 en 2019). Même son de cloche en Colombie-Britannique où les ventes de 1019 de 2018 ont diminué quelque peu à 953 l’an dernier.

Nissan Canada explique ces baisses par le nombre limité d’exemplaires disponibles, la LEAF de deuxième génération qui a vu le nombre de marchés où elle est vendue à travers le monde augmenter de manière significative. Bref, à l’échelle globale, la demande est plus forte pour la LEAF, et l’offre n’a pas toujours pu suivre. Pour 2020, le constructeur prévoit heureusement un retour à la normale du côté des deux provinces les plus « électriques ».

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La voiture purement électrique brille toujours par son absence chez Honda, mais on observe malgré tout le même effet suite à l’abolition du programme ontarien. La berline Clarity hybride rechargeable qui est tout de même éligible à des rabais a vu ses ventes chuter de manière drastique après l’annulation du programme en Ontario. La Clarity s’est écoulée à 415 unités en 2018, tandis que 2019 a vu ce nombre fondre à 106. Dans les deux autres provinces où les rabais sont toujours en vigueur, tout baigne dans l’huile, Honda qui a enregistré des gains significatifs pour sa voiture la moins énergivore au pays.

Ce qu’il faut comprendre à travers ces statistiques de ventes dans les trois provinces où la voiture électrique est bien installée (par rapport aux autres provinces du moins), c’est que tant et aussi longtemps que la voiture électrique va commander un prix de beaucoup supérieur à celui d’une voiture à essence de taille équivalente, la bonne vieille voiture à moteur à combustion interne va l’emporter.

Le jour ou les rabais gouvernementaux au Canada ne seront plus nécessaires n’est toujours pas arrivé.

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Vincent Aubé
Vincent Aubé
Expert automobile
  • Plus de 17 ans d'expérience en tant que journaliste automobile
  • Plus de 60 essais réalisés au cours de la dernière année
  • Participation à plus de 200 lancements de nouveaux véhicules en carrière en présence des spécialistes techniques de la marque