« C'est un matériau assez facile à trouver », lance Peter Friedman, directeur de la production, de la recherche et de l'ingénierie avancée chez Ford.
Il parle bien sûr de l'aluminium, un des sujets de l'heure dans l'industrie automobile. Au cas où vous ne le saviez pas déjà, l'un des véhicules les plus vendus en Amérique du Nord, la camionnette Ford F-150, a été complètement redessiné pour l'année-modèle 2015 et sa carrosserie sera maintenant faite à partir du 3e élément le plus abondant dans la croûte terrestre.
Pourquoi est-ce important de le souligner? Eh bien, dès l'annonce de la nouvelle F-150, plusieurs ont remis en question la faisabilité d'une camionnette en aluminium produite à grande échelle. Ford doit donc se montrer rassurante.
Friedman rappelle que l'usine de Rouge River à Dearborn, dans le Michigan – la plus grosse des 2 usines d'assemblage de la F-150 – se préoccupe beaucoup du recyclage des matériaux. La seconde usine, qui se trouve à Kansas City, dans le Missouri, est présentement en train de se convertir pour la fabrication de camionnettes en aluminium.
« Recycler de l'aluminium nécessite 95 % moins d'énergie que l'extraire de la bauxite », explique-t-il. Une chance, car on perd environ 40 % d'une feuille d'aluminium après les coupes; ce serait un terrible gaspillage si on ne recyclait pas les retailles.
La course à l'aluminium est maintenant lancée; selon une étude de la firme Ducker Worldwide, 7 camionnettes sur 10 auront une carrosserie en aluminium d'ici 2025. General Motors a supposément signé une entente avec des alumineries, si bien que la prochaine génération de la Chevrolet Silverado, prévue pour 2018, devrait être en aluminium.
« L'acier en soi n'est pas aussi recyclable que l'aluminium », remarque Kristina Adamski, directrice des communications d'affaires pour la production chez Ford, qui passe le gros de son temps à l'usine de Rouge River, adjacente au siège social de Ford à Dearborn.
La grandeur de ce complexe est impressionnante, mais ce qui l'est encore plus, c'est la rapidité avec laquelle les chaînes de montage ont été converties de l'acier à l'aluminium. On a dû installer en vitesse de nouvelles machines à découper, de nouveaux robots et de nouvelles techniques d'assemblage, autrement la production de la F-150 aurait ralenti considérablement et les ventes en auraient souffert (plus d'un demi-million d'unités ont été vendues en 2013).
Si certains analystes ont prédit que Ford perdrait 90 000 camionnettes à cause de la transition, la compagnie insiste plutôt pour dire que tout va selon les plans et qu'un délai de production ne serait pas différent de ce que l'on voit normalement lorsqu'une compagnie lance un tout nouveau modèle. « Ça requiert d'énormes efforts, mais il n'y a aucun retard par rapport à la norme », assure Friedman.
Espérons pour Ford que ce soit vrai, car les autres fabricants ont accru leur marketing et leurs incitatifs dans l'espoir d'attirer des clients qui ont besoin d'une camionnette plus rapidement.
Ceux qui mettront finalement la main sur une nouvelle F-150 2015 pourront se vanter d'avoir contribué à populariser la mode de l'aluminium dans l'industrie automobile.
Bien qu'il existe une foule de façons de rendre les camionnettes plus écoénergétiques – Friedman s'empresse de dire que son équipe les a toutes étudiées, allant du diesel aux systèmes de cylindrée variable – une carrosserie en aluminium constitue une solution de choix. « Tous les acheteurs comprennent les avantages de réduire le poids d'un véhicule, mais seulement une minorité comprend les avantages d'un moteur diesel », dit-il.
Avec une panoplie de modèles et de configurations disponibles sur le marché, offrir une camionnette en aluminium risque de faciliter grandement la décision d'achat de nombreux consommateurs, surtout ceux qui en sont à leur première camionnette – d'autant plus que le prix du diesel ne chute pas de manière aussi drastique que l'essence en ce moment.
Bref, un très bon coup de la part de Ford.
