Kia est devenu un joueur important de l’industrie automobile, mais lorsqu’on s’arrête pour y penser, l’année 2019 marquera le 20e anniversaire, seulement, de ses débuts en sol canadien.
C’est peu.
Malgré tout, la firme coréenne a réussi, après des débuts difficiles, à se bâtir une bonne réputation grâce à une constante ; l’amélioration graduelle de la qualité de ses produits. Au tournant de la présente décennie, ses chiffres de ventes au Canada frisaient les 80 000 unités ; la suite des choses était envisagée avec beaucoup d’optimisme.
Le rythme de croissance a ralenti depuis. Inversement, et ironiquement, la qualité de ce qui nous est proposé n’a cessé de progresser, à tel point que les complexes que l’entreprise avait jadis vis-à-vis ses rivaux sont foutrement loin.
La Stinger, qui a fait ses débuts l’an dernier, en est un exemple patent.
Et pour 2019, Kia en remet avec une nouvelle variante à moteur 4-cylindres, la GT-Line, une déclinaison que nous nous sommes empressés de mettre à l’essai.
Un défi de taille
Avant d’aller plus loin, réglons une chose de suite ; la Stinger est une bagnole en tout point impressionnante et la nouvelle variante à bloc 4-cylindres turbo de 2-litres est hyper convaincante.
Tout devrait bien aller donc, n’est-ce pas ? Ce n’est pas aussi simple que cela.
La question avec la Stinger, ce n’est donc pas de savoir si elle est intéressante, mais bien voir si elle représente un bon achat. Là, disons que le carnet d’arguments de Kia est plus mince.
Décortiquons cela ensemble si vous le voulez bien, d’abord avec les arguments qui militent en faveur du modèle, puis avec ceux qui lui nuisent.
L’audace
Dans l’industrie automobile, l’audace est parfois encensée, parfois critiquée avec véhémence, sinon ridiculisée. L’Aztek de Pontiac nous vient en tête pour illustrer cette dernière affirmation. En revanche, le succès d’un produit comme le Nissan Juke prouve que faire autrement peut être payant.
Avec sa Stinger, Kia a osé... de façon conservatrice ; l’avant présente un style plus typique alors qu’à l’arrière, l’approche est différente, tant pour les lignes que pour la configuration, à hayon, à la sauce Audi A7. Une berline pensée distinctement, disons ça comme ça.
Petite cousine de la G70 de Genesis (la marque de luxe de la maison-mère Hyundai), la Stinger profite conséquemment d’excellentes bases. Ces dernières se révèlent à nous lorsqu’on prend le volant. Qu’on circule doucement sur l’autoroute ou qu’on bosse à enfiler les virages sur un chemin sinueux, la Stinger répond très bien à l’appel.
En fait, on a droit à un excellent dosage ici, le genre qui n’est pas sans rappeler l’équilibre d’une Série 5 de BMW. Ne partez pas en peur, car je ne compare pas les deux ; seulement le mariage entre le confort d’une grande routière (GT) et le tempérament d’une sportive que les deux avancent.
Le rapport qualité/prix
L’autre élément qui plaide en faveur de la Stinger, c’est son excellent rapport qualité/prix. Disons que pour profiter des mêmes qualités routières et d’autant de commodités (équipement, caractéristiques de sécurité, etc.), il faut allonger entre 20 000 $ et 25 000 $ pour un produit concurrent logeant au sein d’une marque de luxe.
C’est beaucoup. En prime, la Stinger offre une exclusivité, l’accès à quelque chose de différent ; ce n’est pas à négliger.
Et c’est d’autant plus intéressant dans le cas de cette variante à moteur 4-cylindres. L’an dernier, la première du modèle sur le marché, seule la version à mécanique V6 était proposée au Canada. Avec l’arrivée de la nouvelle recrue, le prix est sabré de 5000 $ pour s’établir à 41 895 $. Les deux moutures équipées du V6 se vendent respectivement 46 895 $ et 51 895 $.
Et avec une puissance de 255 chevaux et un couple de 260 livres-pieds, on n’est pas en reste avec le petit bloc.
Un style audacieux, donc, ainsi qu’un solide rapport qualité/prix. Pas mal comme arguments de départs. Ajoutez à cela un agrément de conduite certain et une belle qualité de finition et vous avez là les ingrédients d’un succès commercial.
Malheureusement, les choses ne sont pas aussi simples que cela. Des forces obscures sont là pour nuire à la Stinger.
Faire ses preuves
Comme tout nouveau modèle qui se pointe sur le marché, la Stinger doit faire ses preuves. Ce qui est d’autant plus difficile pour elle, c’est qu’elle se présente comme un produit premium au sein d’une marque générique. Elle doit non seulement convaincre de sa qualité, mais persuader l’acheteur qu’avec elle plutôt qu’une BMW, une Audi ou une Lexus, par exemple, il fera un meilleur choix.
C’est là que ça se complique.
La Stinger a beau avoir tous les outils, il lui en manque un de taille que seul le temps peut lui procurer ; le prestige. Les acheteurs qui sont capables de faire fi de cet élément vont la considérer au même titre que ses rivales. Le problème, c’est que majoritairement, l’acheteur qui recherche ce type de voiture veut le prestige qui l’accompagne.
La valeur de revente
Ça et l’assurance que la valeur de son modèle ne fondra pas comme neige au soleil.
Rappelez-vous l’Equus de Hyundai il y a quelques années. Certains ont déboursé quelque 80 000 $ pour ce paquebot et trois ou quatre ans plus tard, certains marchands leur en offraient 20 000 $ en reprise.
La valeur résiduelle d’un produit de luxe qui n’a pas encore fait ses preuves et qui œuvre de surcroît au sein d’un constructeur dit générique est un handicap majeur.
Location coûteuse
Un simple exemple ici. Il existe une différence de 22 000 $ entre les versions d’entrée de gamme d’une Kia Stinger et d’une BMW de Série 5. En location sur une période de 48 mois, sans comptant, il n’en coûte que 100 $ de plus mensuellement pour louer la BMW qui va valoir le double au bout de 48 mois (environ 27 000 $ contre 13 500 $).
Lorsque l’acheteur fait son calcul, il comprend rapidement l’enjeu et pour la différence, il va préférer rouler en BMW.
Voilà le genre de défi qui attend Kia avec son produit. Le seul remède, c’est le temps… et la capacité du modèle à tenir le coup pendant que sa réputation se bâtit.
Conclusion
Notre conseil ? Si vous souhaitez acheter et conserver votre prochain véhicule sur une très longue période, la Stinger pourrait s’avérer une excellente affaire. En location, c’est moins le cas, à moins que son rachat soit prévu à la fin du contrat.
La Stinger à moteur 4-cylindres est bourrée de qualités. Au volant, vous allez passer d’excellents moments. Quant à la fiabilité, il faudra voir, le modèle est encore trop jeune pour que l’on se prononce.
Le vrai défi, pour Kia, c’est de ne pas lâcher le morceau et souhaiter qu’à force d’offrir de la qualité, la valeur résiduelle de ses produits finisse par augmenter.
En attendant, l’acheteur doit veiller au grain.
Points forts
- Excellente position de conduite
- Comportement routier très équilibré
- Rendement efficace de la boîte automatique à huit rapports
- Consommation : 8,4 litres aux 100 km
- Très logeable grâce à la configuration à hayon
Points faibles
- Valeur de revente moyenne anticipée
- Visibilité arrière et trois quarts arrière atroce
- Fiabilité à prouver
- Freinage perfectible